Michel Calvet, magicien de la matière et de la couleur
Michel Calvet est né en 1956 à Toulouse, ville dans laquelle il passera sa jeunesse. Après ses études secondaires, il suit les cours de l'école des Beaux-Arts et mène une heureuse vie de bohème, s'adonnant à ses passions : le dessin et la musique. Calvet joue du saxo dans un groupe et envisage de devenir musicien de jazz, tant le jazz avec son rythme et ses improvisations inattendues le fascinent. Durant cette période de liberté, il éprouve alors un besoin impératif de création et c'est avec la peinture qu'il choisira de s'exprimer.
Des 1980, le succès de ses œuvres lui permet de vivre uniquement de son art en exposant à Paris et en province. Au milieu des années 90, après de nombreuses expérimentations sur la couleur et la matière, il opte pour un style qui lui convient. C'est désormais avec le couteau qu'il étend généreusement la peinture sortant de ses tubes pour enrichir ses tableaux d’empâtements puissants qui côtoient des touches plus légères soulignant ainsi l'originalité de sa démarche.
De nombreuses expositions vont confirmer l'engouement du public pour son style original. Des collectionneurs aux Etats-Unis, au Canada, au Japon, en Norvège, en Angleterre, en Allemagne et surtout en France acquièrent sa peinture.
Ses œuvres passent régulièrement en vente publique.
« L’œuvre actuelle de Michel Calvet, plus complexe qu'il n'apparait au premier regard, est un heureux mélange de conservatisme d'audace. Tradition - ou tout simplement métier - dans l'équilibre des masses, la recherche d'une composition structurée et ordonnée, l'emploi de touches grasses sur un fond maigre, mais aussi hardiesse des déformations expressives et du geste impétueux étalant une matière riche et colorée.
Calvet est pris par tous les spectacles qui s'offrent à lui, l'animation des ports, l’activité urbaine, les fêtes et la musique... tout en faisant des croquis et en notant les couleurs. II aime peindre en plein air pour saisir sur le vif une scène éphémère et conserver la trace d'un instant magique. Dans son atelier, au contraire, lorsqu'un motif l’obsède, il médite longuement devant ses notes, ses dessins et ses aquarelles, sur la manière de rendre la sensation éprouvée et toujours très présente. Lorsqu'une image se précise et prend forme dans son esprit, si l’émotion est toujours là, le travail commence.
L'atelier devient alors un lieu clos, non pas silencieux mais envahi de sonorités et de rythmes musicaux adaptes au thème de l'œuvre.
Le peintre commence par disposer sur une immense palette, les contenus d'une vingtaine de tubes vides entièrement. C'est là qu'interviennent l'expérience et surtout le talent, car l'emploi des couleurs pures, c'est-à-dire telles qu'elles sortent des tubes est extrêmement difficile.
Calvet est avant tout un grand coloriste rythmant ses peintures au gré de ses couleurs, comme un musicien jouant de ses notes. Ses couleurs vives frappent les spectateurs, non pour montrer Ia violence des passions humaines, mais pour offrir des tranches de vie quotidienne simple et heureuse.
Les scènes représentées sont toujours figuratives même si leur transposition parfois très forte conduit aux limites de l'abstraction.
Calvet pose, gratte, enlève parfois ce qu'il vient de poser, recouvre un grattage, applique une longue trainée de couleur, place avec délicatesse quelques points éclatants, étale la matière - on devrait dire la lumière - sur une large surface, empâte fortement une zone précise où la trace du couteau demeure bien apparente, dilue au point de conserver par transparence la teinte du fond en certains endroits. Brièvement et fiévreusement calculée, chaque application de matière à sa raison d'être. Elle est un jugement du peintre à partir de tout ce qu'il sait, de ce qu'il vient de faire et de ce veut faire. Chaque œuvre est ainsi le résultat de décisions rapides, de jugements tires de l'expérience du passé, de nouveautés téméraires.
Lorsqu'il estime avoir atteint son but, Michel Calvet s'arrête, épuisé par des heures de concentration intense. Encore dans l’émotion de l'exécution, considérer qu'un tableau est terminé représente le moment le plus difficile pour l'artiste. On ne s'imagine pas tout ce que ce dernier acte, le refus d'une dernière touche qui pourrait affaiblir l'œuvre, représente a lui seul ! Pour Michel Calvet, il n'y a pas de repentir envisageable : ou l'œuvre correspond à ce qu'il voulait au départ, ou elle est détruite.
D'une manière générale, les représentations très animées traduisent une fascination de l'artiste pour les activités humaines.
Lorsque l'humain est absent, les formes et les couleurs s'organisent pour rendre dans une atmosphère mouvante, les chalutiers à quai, les yachts au mouillage, les amoncellements de filets et casiers. Même les natures mortes et les fleurs semblent participer a l'agitation ambiante. »
Extraits de textes de Jean PERREAU - Historien de l’Art